les chansons d'avant
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Nom de naissance Philippe Mathevet Naissance 7 Mars 1927, France
Biographie
Acteur dans French cancan et Notre-Dame de Paris, chanteur de « Julie la rousse » et « Le Noyé assassiné », également mime et danseur, Philippe Clay (1927-2007) a embrassé plusieurs carrières dans les années 1950, puis a connu la désertion du public au cours de la décennie suivante. Il revient en 1971 avec un titre polémique, « Mes universités ».
Chanteur et acteur, Philippe Mathevet dit Philippe Clay est né le 7 mars 1927 à Paris.
Chanteur formé à l'école du mime et des cabarets Rive Gauche des années 1950, Philippe Clay gravite dans l'entourage de Jacques Prévert, Boris Vian et du débutant Serge Gainsbourg à qui il ressemble fortement, et avec qui il interpréte « L'Assassinat de Franz Lehar » à la télévision.
Après quelques expériences au théâtre au sein de la troupe du Palais de Chaillot, il mène de front une carrière cinématographique (French cancan, Notre-Dame de Paris, Des femmes disparaissent, Messieurs les ronds-de-cuir...) et dans la chanson avec les textes de Charles Aznavour.
Après un tour de chant en Afrique, il se produit aux Trois-Baudets et dans les clubs de Saint-Germain-des-Prés où il entonne ses classiques « A Perpète », « Julie la rousse », « Cigarettes, whisky et petites pépées » ou « Le Noyé assassiné » et « Monsieur James ». Il interprète également des chansons signées Jean Yanne, Claude Nougaro et Jean-Roger Caussimon.
Vedette de l'Olympia entre 1957 et 1962 avant d'être dépassé par la vague yéyé, Philippe Clay voit sa carrière battre de l'aile au milieu des années soixante, où il apparaît encore au cinéma. Il marque cependant son retour à la chanson avec « Mes universités » (un million d'exemplaires vendus) et « La Quarantaine » en 1971.
Personnage récurrent des feuilletons télévisés, Philippe Clay chante le générique des Brigades du Tigre (« La Complainte des Apaches »). L'homme, membre actif de la politique culturelle du RPR, est aussi jugé comme un chanteur réactionnaire. Installé dans le château de Villiers à Cerny (Essonne) de 1959 à 2001, Philippe Clay meurt d'une crise cardiaque le 13 décembre 2007.
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Nom de naissance
Juliette Gréco
Naissance
7 Février 1927, Montpellier, Hérault, France
Biographie
« Muse de Saint-Germain-des-Prés », Juliette Gréco voit le jour à Montpellier le 7 février 1927 et est élevée par ses grands-parents et sa mère à Bordeaux, puis à Paris. Petit rat de l'opéra, elle est envoyée dans une institution catholique de Montauban lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, pendant laquelle sa soeur et sa mère, engagées dans la Résistance, sont déportées au camp de Ravensbrück, puis libérées en 1945. Seule et désargentée dans la capitale, la jeune fille trouve la protection de son ancienne professeure Hélène Duc et fréquente les artistes et écrivains du quartier quand elle découvre le Tabou, une cave réhabilitée en scène musicale. Encouragée à chanter par Jean-Paul Sartre, Joseph Kosma et Boris Vian, sa rencontre avec le trompettiste américain Miles Davis, se transforme en idylle lors des ses passages, alors que sa carrière prend forme sur des textes de poètes et d'auteurs comme Jacques Prévert, Raymond Queneau, Charles Trenet, Léo Ferré, Charles Aznavour, Georges Brassens ou son amie Françoise Sagan, dans le plus pur style « rive gauche ». Acclamée aux Etats-Unis, la « longue dame brune » à la gestuelle expressive s'épanouit au cinéma avec la rencontre du producteur Daryl F. Zanuck, qui lui offre des rôles sur mesure dans Le Soleil se lève aussi (1957) et Les Racines du ciel (1958). De retour à la chanson après cette parenthèse hollywoodienne et passionnelle, Juliette Gréco interprète « La Javanaise » de Serge Gainsbourg en 1962 et connaît un succès populaire par son apparition, masquée, dans le feuilleton télévisé Belphégor ou le fantôme du Louvre (1965). Mariée à Michel Piccoli, elle chante en 1966 « Déshabillez-moi » et interprète Mac Orlan, Maurice Fanon et Henri Gougaud. Oubliée dans la décennie suivante, l'icône de la chanson française retrouve progressivement la place qui lui revient auprès du public, avec les albums nés de son compagnonnage musical et amoureux avec le pianiste de Jacques Brel, Gérard Jouannest, Aimez-Vous Les Uns Les Autres (2003), Je Me Souviens de Tout (2009) et Ça Se Traverse et C'est Beau (2012), nourris de collaborations avec la nouvelle génération d'auteurs. Après une alerte cardiaque en 2013 et un ultime hommage à Brel, la longue traversée de Juliette Gréco dans la chanson s'achève à l'âge de 93 ans, le 23 septembre 2020, dans sa résidence de Ramatuelle.
Lorsque Juliette Gréco pénètre dans une pièce, plus rien n'existe à part elle. Cela ne s'explique pas, et n'est pas une conséquence d'une quelconque starisation à la petite semaine, dont l'époque est prodigue. Comme une bonne actrice attire la caméra, et un modèle compétent la lumière du photographe, Gréco attire l'attention, la prévenance, la déférence, le respect.
Plus que son apport, pourtant considérable, à la chanson francophone, on retient d'elle une capacité, pratiquement unique, à symboliser, non seulement une époque (grosso modo le début des Trente Glorieuses françaises), mais bien un état, une disposition d'esprit afférents à cette période. Juliette Gréco incarne donc la liberté, l'impertinence, la sensualité révolutionnaire, la libération de la femme et de l'esprit, l'ouverture au monde, et la fin des tabous et des idées reçues. Il fallait un sacré talent pour mener pareille carrière. Il fallut un sacré caractère pour ne pas s'y noyer. Juliette Gréco n'est jamais la caricature d'elle-même : elle offre toujours l'image (le modèle) d'une artiste libre.
Une enfance aventureuse
Juliette Gréco naît le 7 février 1927, à Montpellier. Son père, d'origine corse, est policier sur la Côte d'Azur, et très absent dans la vie de la fillette. Juliette et sa soeur Charlotte sont élevées dans le bordelais, à Talence, par leurs grands-parents maternels. Leur mère, née Juliette Lafeychine, n'a jamais dissimulé que Juliette est une enfant non désirée, née par accident. « Toutoute » (c'est le surnom de Juliette) grandit dans la réserve et l'introspection. Sa scolarité se déroule dans une austère école religieuse.
En 1936, son grand-père décède, et sa grand-mère ne peut plus assumer seule son éducation. La mère récupère les deux petites filles, et s'installe rue de Seine, à Paris. En 1939, elle est petit rat à l'école de danse de l'Opéra de Paris : sinon elle, du moins sa famille envisage pour son compte une carrière de ballerine. A la déclaration de la guerre, la petite famille retrouve néanmoins un semblant de sécurité en Périgord, dans une belle propriété, La Marcaudie. La maman y vit une passion amoureuse avec Antoinette Soulas (poétesse dont les plaquettes furent préfacées par André Maurois).
Juliette mère, donc, engagée dans la Résistance avec le grade de capitaine, est arrêtée le 9 septembre 1943, à Périgueux. La mère et la soeur de Juliette sont déportées. Grâce à son jeune âge, Juliette échappe à la déportation, mais est emprisonnée à Fresnes.
C'est sa seule connaissance dans la capitale qui l'héberge à sa libération. Hélène Duc, comédienne (elle s'illustrera dans Les Rois maudits de Josée Dayan), est une amie de sa mère, et son ancien professeur de français, lors d'un séjour à Bergerac. Cette femme de caractère sera célébrée comme Juste parmi les Nations, pour avoir sauvé, avec sa mère institutrice, des dizaines de juifs. C'est auprès d'elle que Juliette découvre l'art dramatique : elle échoue au concours d'entrée au Conservatoire, mais décrochera tout de même quelques figurations à la Comédie-Française (elle fera la vague, dissimulée sous une bâche, dans un Soulier de satin de Paul Claudel, mis en scène par Jean-Louis Barrault !).
En 1945, c'est la Libération, et le terme s'applique avec une particulière pertinence aux quartiers de Saint-Germain-des-Prés, et du Quartier Latin, proches de la pension où réside Juliette. La jeune fille découvre simultanément l'effervescence intellectuelle, la liberté de penser et d'agir, et les Jeunesses Communistes. A la libération de sa mère et de sa soeur des camps de concentration, elles retournent en Dordogne. Puis, la mère s'engage dans la marine nationale, et prend la mer avec le corps expéditionnaire français en Indochine. Les deux jeunes filles regagnent alors bien vite Paris.
C'est l'effervescence de la liberté retrouvée, dans les cabarets, et les clubs de jazz. Juliette ne mange pas tous les jours à sa faim, ne vit que d'expédients et de petits boulots, mais croise au bar du Pont-Royal l'aristocratie artistique de l'époque, Albert Camus, des jazzmen américains, Marguerite Duras, Jean-Paul Sartre, ou des auteurs anglo-saxons de romans policiers.
Au pays des merveilles de Gréco
En 1946, la jeune fille s'essaie au théâtre (la Gaîté-Montparnasse), et à la technologie innovante de l'époque, la radiodiffusion, pour des émissions consacrées à la poésie. Elle perd malheureusement le premier amour de sa vie, le pilote automobile Jean-Pierre Wimille, tué au volant d'une Simca Gordini, lors des essais préparatoires au Grand Prix d'Argentine.
En 1947 ouvre le lieu emblématique de l'époque, ce cabaret Le Tabou où se croisent Miles Davis, Boris Vian et Jean Cocteau. Juliette devient la figure de proue de l'endroit, ainsi que d'un lieu concurrent, La Rose Rouge. Toutes les jeunes filles tentent dorénavant de copier son pantalon noir en fuseau, son chandail moulant, et son oeil de velours. C'est alors l'apogée de l'existentialisme, philosophie de la liberté individuelle, et de la subjectivité. Être maître de ses actes, et, partant, de son destin, ne peut que convenir à une jeunesse qui a été bridée dans ses aspirations et pulsions, par les années d'occupation.
En 1949, c'est riche de chansons écrites par Boris Vian, Raymond Queneau (« Si tu t'imagines »), Jacques Prévert (« Les Feuilles mortes »), René-Louis Lafforgue, ou Sartre - et des musiques de Kosma - qu'elle se produit sur la scène exiguë du Boeuf sur le Toit, cabaret récemment réouvert. Sa voix, sensuelle et grave, fait merveille dans cette collection de chefs d'oeuvre.
La même année, Cocteau lui offre un rôle dans Orphée, et elle rencontre d'une façon plus assidue Miles Davis. La jeune chanteuse et le trompettiste noir américain s'éprennent l'un de l'autre. Juliette devient, versant amoureux, une militante active des droits civiques, et de l'antiracisme. C'est avec gourmandise qu'elle narre sa rencontre orageuse avec un concierge de palace, peu enclin à accueillir dans la même chambre un noir, et une blanche (ce qui fait pourtant souvent de la très bonne musique).
En 1951, elle enregistre son tout premier disque, Je Suis Comme Je Suis, comme une profession de foi), et reçoit le prix de la Sacem pour la chanson « Je hais les dimanches » (signée Charles Aznavour, et également interprétée par Edith Piaf). En 1952, la revue April in Paris, adaptation pour la scène d'un film de Doris Day, la transporte aux Etats-Unis et au Brésil.
En 1953, elle rencontre le comédien Philippe Lemaire (spécialiste des films de cape et d'épée) sur le plateau du sombre Quand tu liras cette lettre, de Jean-Pierre Melville. Les amoureux s'épousent le 25 juin. Leur fille Laurence-Marie voit le jour le 24 mars 1954, et le couple divorce en 1956.
En 1954, Juliette Gréco occupe pour la première fois la scène de l'Olympia, puis elle s'envole pour New York, où elle subjugue les auditoires par ses interprétations des auteurs du répertoire. Hollywood fait appel à elle, et c'est sur le tournage de Le Soleil se lève aussi d'Henry King qu'elle rencontre le nabab et producteur Darryl Zanuck, de près de trente ans son aîné.
Cette nouvelle romance la conduira à tourner sous la direction d'Orson Welles, John Huston, ou Richard Fleischer. De retour en France en 1961 (lassé du caractère dominateur de l'homme de cinéma américain), elle occupe la scène de Bobino, puis se consacre à faire découvrir de nouveaux talents de la chanson francophone, tels Léo Ferré (« Jolie môme »), Guy Béart (elle crée « Il n'y a plus d'après »), ou Serge Gainsbourg. C'est en 1963 que ce dernier écrira pour elle « La Javanaise ».
En 1965, elle effraie toute une génération de petits français en incarnant un double rôle dans Belphégor ou le fantôme du Louvre, magistrale adaptation télévisée d'un roman d'André Bernède, et feuilleton de Claude Barma programmé en pleine égyptomania. Juliette Gréco commet toutefois quelques mois plus tard une tentative de suicide. Bienheureusement, en septembre de la même année, deux artistes emblématiques d'une certaine conscience politique à la française unissent leurs vies : Juliette et Michel Piccoli ne divorceront qu'en 1977.
En 1966, un producteur de Philips décide qu'à l'occasion du 1er avril, les artistes de la maison interprèteront les succès des autres : Juliette se frotte au « Jouet extraordinaire » de Claude François, et au « Folklore américain » de Sheila, deux chansons qui resteront inédites jusqu'à la publication d'une Intégrale de l'artiste en 2003. Plus sérieusement, elle partage l'affiche du Théâtre National de Paris avec Georges Brassens, dont elle avait interprété une dizaine d'années auparavant la « Chanson pour l'Auvergnat ».
En 1967, elle habite une « Chanson des Vieux Amants » composée par Jacques Brel, et 60 000 spectateurs l'applaudissent à Berlin. Juliette Gréco, pâle dans une robe de soirée noire, devant un rideau rouge, incarne alors la beauté, l'intelligence, et le talent. En 1968, c'est au Théâtre de la Ville de Paris qu'elle crée l'une de ses plus remarquables chansons, « Déshabillez-moi » (qui sera plus tard interprétée par Mylène Farmer et Diane Tell) : « Déshabillez-moi (bis)/ Oui, mais pas tout de suite, pas trop vite/ Sachez me convoiter, me désirer, me captiver ».
Cette ode à la sensualité et à l'amour physique, écrite par Robert Nyel et Gaby Verlor (par ailleurs auteurs du « P'tit bal perdu » pour Bourvil), bouleversera tous les publics de la planète. Affirmation - à une époque où cela ne se faisait pas - du plaisir et du désir féminins, la chanson trouvera un lointain écho dans le « Je t'aime...moi non plus » de Serge Gainsbourg (« Maintenant...viens ! »). D'autant que la chanson s'achève par une invraisemblable (toujours à quelques encablures des évènements de Mai 68) prise de pouvoir par l'érotisme féminin de la rencontre amoureuse : « Et vous...déshabillez-vous ! » (agrémenté d'un torride traînement de la voix sur le « Dé...shabillez-vous ! »).
En février de la même année, Juliette sollicite le pianiste, arrangeur, et compositeur Gérard Jouannest (fidèle compagnon de Jacques Brel), pour qu'il l'accompagne dans une tournée au Canada : quarante années plus tard, la collaboration est ininterrompue, et le musicien et la chanteuse se sont mariés en 1989, entre une tournée en Allemagne, et une série de récitals au Japon.
Un peu de silence, beaucoup d'éternité
La carrière de Gréco connaît une indiscutable décélération dans les années 70, même si elle reste fidèle à son habitude de mettre en chansons les plus grands poètes français (Henri Gougaud). Mais, devenue un monument, elle n'hésite pas non plus à clairement exprimer ses convictions politiques et philosophiques. Ainsi, c'est à Santiago du Chili, que, devant un parterre de militaires, elle déroule un récital composé de chansons antimilitaristes : le concert est un échec retentissant, mais la chanteuse en conçoit une grande (et, on dira, légitime) fierté. En 1982 paraît son autobiographie,
Jujube. Elle met à profit la fin de la décennie pour se produire annuellement dans une dizaine de pays. Elle enregistre tout aussi régulièrement (dans Gréco 83, elle chante Jean Ferrat). L'artiste est faite Chevalier de la Légion d'honneur en 1984.
Au début de l'année 1991, elle retrouve, après sept années d'absence sur une scène française, l'Olympia de Paris. Au printemps de la même année, elle est invitée au Printemps de Bourges. Mais un malaise interrompt sa prestation à la quatrième chanson : rendez-vous est pris pour l'édition suivante, où un véritable hommage lui est rendu. En 1993, c'est en novatrice qu'elle enregistre un nouvel album, alimenté de chansons de Julien Clerc, ou des Brésiliens Caetano Veloso et Joao Bosco.
En 1994, elle s'envole pour une nouvelle tournée dans l'un de ses pays de prédilection, le Japon. En 1997, le Théâtre Antique d'Arles l'accueille dans le cadre des Rencontres Photographiques, pour un concert exceptionnel sur fond de projections de clichés. En 1998, l'album Un Jour d'Eté et Quelques Nuits est uniquement consacré à des poèmes de Jean-Claude Carrière, mis en musiques par Gérard Jouannest. Madame Gréco est la même année décorée des insignes d'Officier dans l'Ordre National du Mérite.
Bien qu'elle se soit essayée à quelques reprises, et souvent avec talent (« Le Suprême de volaille aux crevettes » - 1969) à l'écriture de ses propres paroles de chansons, Juliette Gréco semble avoir toujours préféré la découverte de nouveaux auteurs, et la mise en valeur de leurs talents d'écriture et de compositions, à la création originale. Elle reste également la garante d'une qualité spécifique à la chanson d'expression francophone (représentée par ces plus grands auteurs, de Charles Trenet à Serge Gainsbourg, en passant par Joseph Kosma, Pierre Louki, et Françoise Sagan). Cette démarche fait d'elle un talent unique dans le panorama de la chanson française. Elle symbolise également le parfum enfui d'une époque, où le Café de Flore était le centre de la création artistique mondiale.
Au mois de mai 2001, alors qu'elle chante sur une scène montpelliéraine, elle s'effondre, victime d'un malaise cardiaque. Sa convalescence (sic) passera par une tournée canadienne. En 2003, l'album Aimez-vous Les Uns Les Autres ou Bien Disparaissez se nourrit de chansons de Serge Gainsbourg ou d'Aragon, mais également de Gérard Manset, Miossec, Benjamin Biolay et Art Mengo.
En 2004, une nouvelle série de récitals passe par la scène de l'Olympia de Paris. En 2006, Le Temps d'une Chanson est consacré à des chansons composées pour d'autres, mais qu'elle a coutume d'interpréter sur scène : on y retrouve Julien Clerc (« Utile »), Maxime Le Forestier (« Né Quelque Part »), « Syracuse » ou « Avec le Temps ». Mieux encore : la chanteuse s'entoure des plus grands noms du jazz américain, du saxophoniste Michael Brecker au trompettiste Wallace Roney. En 2007, elle se voit décerner une Victoire de la Musique pour l'ensemble de son oeuvre.
À quatre-vingt cinq ans, Juliette Gréco n'a pas dit son dernier mot. L'album Ça Se Traverse et C'est Beau supervisé par Gérard Jouannest est l'occasion d'évoquer les ponts de manière symbolique, à travers des chansons confectionnées sur mesure par Amélie Nothomb, Jean-Claude Carrière, Philippe Sollers ou François Morel. Juliette Gréco chante son premier texte, « Le Miroir noir », et s'offre des duos avec Marc Lavoine (« C'est la la la » et le morceau-titre), Féfé (« Paris se rêve ») et la chanteuse américaine Melody Gardot (« Sous les ponts de Paris »). L'année suivante, elle rend hommage à Jacques Brel qu'elle n'avait interprété que rarement en dehors de la scène. L'album Gréco Chante Brel qui paraît en octobre 2013 comprend douze classiques réarrangés par Bruno Fontaine et Gérard Jouannest (ancien accompagnateur et arrangeur du chanteur belge). La violoncelliste Sonia Wieder-Atherton collabore à « La Chanson des vieux amants ».
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Éliane Marie Amélie Colombo naît un 6 juillet 1934 à Homblières (Aisne), près de Saint-Quentin, d’un père italien, chaudronnier milanais de son état, et d’une fille du Nord de la France épousée à Paris. Elle est laissée juste après sa naissance aux bons soins de sa grand-mère maternelle à Homblières. La petite Éliane part le matin avec son casse-croûte, elle grandit dans les champs. Sa grand-mère ne la revoit que le soir. Elle rentre à l’école, vers 5 ans comme cela se faisait couramment à cette époque à la campagne : c’est pour elle la fin de l’indépendance. Elle rend rapidement son tablier sans persévérer. On peut considérer que c’est un miracle si, plus tard, elle sait lire et écrire.
Cette enfance loin de ses parents explique sa relation avec cette grand-mère qui l’accompagnera très longtemps dans sa vie : elle a remplacé une mère qui n’était pas là et lui a donné l’affection dont elle avait besoin pour exister. Nul doute que ces premières années de vie lui ont définitivement forgé le caractère qui transparaîtra dans sa carrière. D’ailleurs, le journaliste Lucien Rioux écrira d’elle : « Il faut là du courage, mais de la part de Pia, cela n’étonne pas. Cette fille mince, nerveuse, à la fois agressive et tendre, a l’habitude des rétablissements. Elle a frôlé la gloire, connu des échecs; elle parle de sa chance. »
À douze ans, ses parents la reprennent en région parisienne et l’emmènent au Théâtre du Châtelet. « Là, c’est comme sur les images pieuses, le Saint-Esprit avec ses rayons dorés qui vous tombe sur la tête », Eliane voit des « gens qui dansent sur le bout des pieds » et c’est la révélation : elle se dit : « Moi aussi ». Nous sommes alors en 1946, c’est le début de la vocation artistique de la future Pia COLOMBO.
Têtue, acharnée, Eliane Marie Amélie Colombo n’a de cesse d’être petit rat au Châtelet. Pour pouvoir rester, elle promet à ses parents qui se laissent convaincre de gagner son pain. Le soir, en regardant bien, on peut apercevoir une fillette noiraude aux yeux éblouis.
En 1949, Eliane a eu quinze ans, mais c’est la catastrophe (une de celles dont les producteurs de disques et les agents artistiques pourraient se servir utilement pour leur biographie publicitaire). Une angine mal soignée dégénère en danse de Saint-Guy. Eliane Marie Amélie s’arrête de grandir, et ne pèse alors plus que 35 kg. La situation devient critique : souffrant de rhumatismes, elle ne peut même pas boutonner son chandail toute seule. Elle fixe désespérément, dans les miroirs, ses mains tremblantes, sa tête branlante et se jure : « Ou je guéris ou je crève ».
Après trois années de maladie, Pia COLOMBO guérit enfin, mais doit abandonner la danse.
Nous sommes maintenant en 1952. Une ancienne du Châtelet, devenue coryphée, l’emmène au Cours Simon. On lui fait bredouiller du Jean Anouilh Antigone, ce qui est dans la nature des choses quand on prend des cours dans un tel lieu.
La coryphée, fille entreprenante, monte un petit spectacle de patronage sous forme de textes et de chansons. Elle demandera à Eliane Pia de chanter, celle-ci accepte et chante sans avoir appris. Un jeune professeur d’anglais au lycée Buffon de Paris, un certain Maurice Fanon, auteur et compositeur à ses heures perdues, l’entend et l’encourage : « C’est très bon, il faut continuer ». Il lui propose de lui écrire des chansons. Elle redevient studieuse, apprend et chante du matin au soir. Une relation amoureuse, mais adultère commence à naitre vers 1955 entre nos futurs jeunes premiers. Fanon s’était en fait marié en Ecosse à Margaret Chalmers Buchan le 14 août 1952 qu’il avait rencontré durant un séjour pour parfaire ses études universitaires d’anglais. Le couple Fanon // Chalmers se décide à divorcer en 1956. Il s’ensuit que toujours en 1956, Eliane Marie Amélie Pia COLOMBO fait sa valise, accompagnée de sa grand-mère, et part s’installer chez Maurice Fanon.
Toutefois, après plusieurs mois de vie plus ou moins commune, Maurice Fanon, sursitaire en bout de course pour ses études doit partir à l’armée, et se retrouve, malgré lui, loin de Pia en Algérie de mars 1957 à mai 1959 pour y soutenir les forces françaises en tant qu’appelé du contingent et alors que la guerre gronde.
Au retour de Fanon en mai 1959, et après les quelques mois de retrouvailles qui suivent, les amoureux Pia et Maurice se décident : ils se marieront le 28 septembre 1960, mais se sépareront près de 3 ans après en 1963. Ils continueront cependant à garder des liens fidèles d’amitié de ces 7 années passées ensemble jusqu’à la fin de la vie de Pia allant jusqu’à lui écrire un spectacle sur mesure en 1979.
Depuis cette époque, Pia COLOMBO sera toujours reconnue étant la muse de Fanon et ce jusqu’à la fin de leurs vies respectives.
Éliane Pia poursuit ainsi ses études de théâtre au cours Simon, puis se tourne rapidement vers la chanson tout en continuant de jouer.
Elle se présente au Collège Inn. On la renvoie : « Vos chansons sont mauvaises, vous êtes mauvaise, tout est mauvais. ». Elle se présente au Cabaret L’Écluse, dans la même journée. Léo Noël, un des cofondateurs de ce lieu de culture et de divertissement estampillé rive gauche, l’engage pour un an. « Deux mille vieux francs par soir, puis trois ». C’est au moins le pain assuré pour elle et la grand-mère. Le pain, mais pas toujours le loyer.
Là, elle prend le nom de scène de Pia COLOMBO et sera l’interprète notamment de la chanson Julie la Rousse de René-Louis Lafforgue. Elle choisit d’interpréter aussi des œuvres de Maurice Fanon en 1956, l’homme avec qui elle vit. Ils se sépareront après plusieurs années de vie commune autour de 1963.
Pia COLOMBO est signée par la maison de disques Versailles avec laquelle elle enregistrera 2 disques maxi-45, soit 8 titres. Elle sort ainsi son premier 45 tours en 1956 avec donc deux chansons de René-Louis Lafforgue (« Julie la rousse » et « La fête est là ») et deux de Fanon (« Isabelle » et « À nos amours » empreint d’autobiographie).
Sa carrière de chanteuse démarrera vraiment à la fin de 1956 en chantant au cabaret L’Écluse qui se trouvait au 15 du quai des grands Augustins, place Saint-Michel à Paris VI (métro : station Saint-Michel). Elle débutera cette même année sur les planches de cette minuscule scène en compagnie d’autres nouveaux venus non dénués de talent : Jean-Roger Caussimon, François Rauber, Marie-Josée Neuville, Caroline Cler, Raymond DEVOS, Henri Garcin et Jean Harold. Elle y chante les chansons de Maurice Fanon que l’on retrouvera sur son deuxième 45 tours : « Le Quai Malaquais », « Moi j’ai l’Italie », « Péniche » et « Si Paris Paris pouvait » qui sortira en 1957. Elle côtoie ainsi BARBARA qui a aussi débuté à L’Écluse, elles se fréquenteront régulièrement. Le livre Le Cabaret « rive gauche » parle des débuts sur les scènes cabarets rive gauche de plusieurs interprètes et auteurs de chansons françaises de cette époque dont notamment BARBARA et Pia COLOMBO.
En 1958, elle poursuit sa carrière de chanteuse avec les disques Philips et joue Hula Hoop au Disco Théâtre du théâtre Marigny (avec Art Simmons et Harold Nicholas).
Elle sera à l’affiche de l’Olympia encore 1958 en première partie de Georges BRASSENS en alternance avec Michèle Arnaud, Jean-Marie Proslier, Jean Bertola, Los Gatos… Premier contact avec un grand public. Brassens l’emmènera avec lui, en tournée. BARBARA est devenue son amie. Toutes deux souffrent de manques de relations familiales avec leurs parents respectifs, cela les a probablement rapprochées.
Autour de 1958, on retrouve trace de son passage sur la scène du cabaret « Port du Salut ».
En 1959, Pia COLOMBO chante et enregistre le titre défendre l’afficher : il fait partie des 6 premières chansons que Lucien Ginzburg (Alias Julien Grix, alias Serge GAINSBOURG) dépose en 1954 à la SACEM dont deux seulement seront sauvées de l’oubli. Puis elle retrouve de nouveau les devants de la scène en vedette américaine. du programme Brassens à Bobino.
Pendant ce temps là, le séjour militaire de Fanon en Algérie est émaillé de quelque écueil, celui-ci tient des propos hostiles à la « pacification » et dérangeants pour sa hiérarchie militaire. A ce titre, il est alors muté et terminera malgré tout avec le grade de caporal. Pourtant Maurice Fanon n’en restera pas là et dénoncera plus tard la torture dans plusieurs chansons : « La Valse à soldats » (1966), et « Le Képicon » (1982). Mai 59, Fanon libérable, est finallement renvoyé dans ses foyers après servi cette guerre d’Algérie qui le marquera comme beaucoup, la vie d’artiste débutante comblée commence alors à sourire à Pia COLOMBO.
En 1959 toujours, elle obtient une première récompense : Coq d’Or de la chanson française pour son interprétation de la chanson « Les flonflons du bal ». Pia COLOMBO enregistre 2 nouveaux disques EP dont la chanson La valse à mille temps que lui a donnée Jacques BREL, parue en 1959 aussi chez Philips.
Mais c’est la chute, le rock et les yéyés arrivent et balaient tout sur son passage et notamment ceux qui n’ont pas eu le temps de s’imposer. Pia retombe et vivote alors tant bien que mal.
Par moments, elle se demande si elle ne devrait pas tout lâcher. Mais comme elle ne sait rien faire d’autre, elle continue à tracer son sillon.
Pia COLOMBO retourne sur la rive gauche dans les cabarets qui l’ont aidé à débuter et se faire un nom. C’est ainsi que l’on retrouvera son nom dans la liste des artistes qui sont passés en représentation sur la scène de différents cabarets comme La tête de l’art avant 1957 et ensuite dans les années 1960. Il en va de même pour son passage sur la scène de la pépinière de Jacques Canetti : le cabaret Les Trois Baudets et à la Maison Pour Tous ou autrement appelé Théâtre Mouffetard, ainsi qu’au cabaret La Contrescarpe avec Francesca Solleville et Christine Sèvres. Pia COLOMBO fait partie aussi de la liste d’artistes ayant débuté ou y ayant été programmé dans les premières années de leurs débuts au cabaret de La Colombe entre 1954 et 1964.
En 1960, Pia COLOMBO interprète Les croquants de Georges BRASSENS. Avec Georgie Viennet, elle passe, de nouveau, en première partie de ses concert à Bobino du 14 au 25 avril 1960.
Maurice Fanon et Pia COLOMBO se marient le 28 septembre 1960.
Le 26 mars 1961, elle est l’invité du gala des 25 ans de l’U.J.F.F. qui publie le journal Filles de France : elle se produit pour cette occasion sur la salle de la Mutualité de Paris, juste après Joël Holmès en première partie et avant le bal de la soirée animée par Georges Jouvin et sa trompette d’or : tenue correcte exigée comme le mentionne l’affiche…
Pia COLOMBO est ensuite repérée à cette époque par Roger Planchon, jeune metteur en scène de théâtre novateur.
Planchon la fait alors jouer et chanter dans une pièce de Bertolt Brecht, tirée des 4 tomes du roman satirique inachevé de l’écrivain tchèque Jaroslav Hašek (1883-1923), publié en quatre tomes de 1921 à 1923 et intitulé Le Brave Soldat Chvéïk. C’est ainsi que fin 1961, début 1962 on la retrouve au théâtre avec Schweik dans la Seconde Guerre mondiale, mise en scène par Roger Planchon au Théâtre de la Cité de Villeurbanne (et futur TNP en 1972), puis au Théâtre des Champs-Élysées. Pia y tient le rôle de Madame Patocka, l’aubergiste. L’ORTF consacrera à cette création de Planchon un reportage télévisé de 8 minutes avec des extraits de la pièce, diffusé le 22 octobre 1961. On y voit et entend Pia Colombo chanter une chanson phare de l’oeuvre sur une musique de Hanns Eisler.
Ce couple d’activités chanson et théâtre l’accompagnera tout au long de sa carrière et particulièrement jusqu’à la fin où elle ira même jusqu’à mettre en scène sa propre vie écrite par le compagnon de toujours Maurice Fanon.
En 1962, elle reprend quelques lieder, qualifiés d’« extraordinaires », de l’auteur révolutionnaire Brecht et mis en musique par Hanns Eisler : Chanson de la femme du soldat, Chanson de la brise, Chant du calice et Chant de la Moldau. Son interprétation y est d’une sècheresse implacable et pourtant presque lyrique. Un disque LP sera publié cette même année avec des transitions de Roger Planchon. On retrouve également au chant sur ce disque Jean Bouise et Clotilde Joano, camarades de scène pour cette pièce. L’EP 4 titres paru simultanément reprend uniquement des titres interprétées par Pia.
Édith PIAF meurt en 1963, un grand nombre de spécialistes de la chanson française pensent alors à Pia COLOMBO pour la remplacer. Mais elle est trop intellectuelle pour séduire le public d’Édith avec cependant un excellent répertoire fait d’auteurs comme Claude NOUGARO, Serge GAINSBOURG, Holmès et Fanon. Le rock et les yéyés continuent leur conquête du public. On trouve alors peu de gens pour croire encore à ce style de chanson française à texte. Mais Pia continue et remonte lentement la pente vers la reconnaissance du public et de ses « pères ».
Cette année 1963, encore, Pia COLOMBO et Maurice Fanon se séparent, il écrira à ce moment-là l’un de ses titres les plus connus L’écharpe qu’elle enregistre en 1964.
C’est évidemment Pia qui a quitté Maurice, comme toutes les femmes officielles ou de rencontre de ce dernier, plutôt porté sur le charme féminin. Il est dit par ses amis et ses confrères du monde de la chanson que l’on décrit Fanon comme un homme serviable aussi charmant et « féminin », la main sur le cœur à jeun, mais en revanche, déprimé, querelleur puis agressif et bagarreur lorsqu’il était bien éméché. Et il avait acquis encore au fil des années une notoriété de grand coureur de jupons.
Le jugement de divorce est prononcé le 16 avril 1964. Fanon avait en fait une maitresse qu’il épouse en 3ème noces le 12 octobre 1964 : Brigitte Tranchant.
En 1964, Georges BRASSENS décide de chanter trois mois à Bobino et il va intégrer dans ses premières parties de spectacle quatre chanteuses successivement auxquelles il donne une chance : Pia COLOMBO, Christine Sèvres, Michele Arnaud et BARBARA. Elle est accompagnée à cette époque par Jacques Debronckart au piano.
En décembre 1964, on retrouve Georges BRASSENS, Pia COLOMBO et Marc Ogeret pour le récital Poésies en chanson à Bobino.
Le 25 février 1965, à La Mutualité, Jean FERRAT, Pia COLOMBO, Maurice Fanon, Christine Sèvres, Claude Vinci et 10 autres artistes se réunissent pour donner un grand gala au bénéfice des sinistrés algériens du tremblement de terre de M’sila, sous le patronage de l’Association d’Amitié et de Solidarité Franco-Algérienne (A.S.F.A.).
Le 24 mars 1966, elle se fait l’interprète du titre Je hais les dimanches, initialement interprété par Juliette GRECO.
Pourtant elle enchainera, bel et bien en 1966, au TNP, sur Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny : un véritable opéra en 3 actes de Kurt Weill et Bertolt Brecht où elle joue la partition de Jenny. Son adéquation avec l’art de Brecht est telle que Pia fut et reste en France son meilleur soldat, loin des vulgaires œillades de cabaret ou des pastels dépouillés et délavés (Ute Lemper). Georges Wilson lui donne carte blanche pour le rôle de Jenny. Il lui précisera simplement : « Surtout, sois toi-même. Fais ce que tu veux, les mouvements que tu sens. Je déplacerai la mise en scène autour de toi. Surtout garde bien ta tête enfoncée dans les épaules. Comme tu es, comme tu es. »
Pia dira de cette prestation de scène à propos d’elle-même : « J’y ai tout appris. Avant je ne savais pas ce que c’était que chanter.» C’est un grand tournant de sa carrière.
L’opéra et son interprétation font la une des journaux de l’époque en matière de spectacle. L’Hedomadaire Le Nouvel Observateur lui consacre la pleine page 31 de son numéro 109 du 14 décembre 1966 : la journaliste Michèle Manceaux revient dans son article sur les débuts de carrière difficile et parle de sa rencontre avec Pia et sa grand-mère dans le petit logement de l’avenue de Saint-Mandé, près de là où vécut Courteline et décoré au mur d’une photo de Marie LAFORET« parce qu’elle est belle ».
Michèle Manceaux écrira notamment au sujet de ce rôle d’opéra :
« Et puis, tout à coup, ce mois-ci, de quarante spectateurs par soirée, Pia COLOMBO passe à deux mille cinq cents et les critiques aiguisent leurs adjectifs les plus ronflants pour décrire « sa voix rauque, sa présence pathétique ». Même si l’on est insensible à la mise en scène au carré de Mahagonny, Brecht et Kurt Weill aseptisés, on ne résiste pas à cette Pia COLOMBO, à son air d’oiseau. ».
En février 1967, elle passe à l’Olympia avec Alain BARRIERE.
Puis, elle enregistre le titre La Rue des Rosiers : paroles de Silvain Reiner et musique de Joël Holmès. Cette chanson qui évoque la rafle du Vel’ d’Hiv’ de juillet 1942, fut écrite dans des conditions très particulières avec Joël Holmès, un après-midi de l’été 1965. Joël Holmès l’avait donnée à Pia Colombo parce qu’elle était venue lui demander des chansons. Pur hasard, sinon, cette chanson tombait à la trappe totalement, car il ne l’avait même pas déclarée à la S.A.C.E.M. et Silvain Reiner l’avait oublié.
Pia COLOMBO part en tournée à l’automne de cette même année en URSS.
On la croit alors prête pour jouer la vedette américaine, fin 1967, de Charles AZNAVOUR à L’Olympia. Mais ça ne fonctionnera pas, elle dira plus tard en 1969 : « Une erreur. J’aurais dû refuser. Le public d’Aznavour n’est pas mon public; je m’entendais mal avec Coquatrix, je n’avais pas confiance. ». Elle se retrouve donc à nouveau en situation d’échec, de ceux qui coulent définitivement une carrière d’ambition modeste. Mais Pia COLOMBO persiste.
Le 14 mai 1968, Pia participe avec Marcel AMONT, Tessa Beaumont, Guy BEDOS, BOURVIL, Leny ESCUDERO et d’autres artistes au gala de bienfaisance au profit des « Enfants du Viêt Nam victimes de la guerre » organisé à l’Olympia par la Croix-Rouge française. Ce gala, en tenue de soirée, dont le prix des places valaient entre 30 et 200 francs, ne fut pas orienté politiquement. Les bénéfices ont été versés, à parts égales, à la Croix-Rouge du Nord-Viêt Nam et Sud-Viêt Nam.
Toujours en mai 68, Bobino est occupé et une soirée y est organisée pour le soutien aux grévistes : pour quelques francs, on voit chanter Jean FERRAT, Isabelle AUBRET, Félix Leclerc, Pia COLOMBO, Georges MOUSTAKI et Leny ESCUDERO.
Un enregistrement de L’Olympia sortira en 1968 dont on trouve actuellement peu de traces (Disques AZ). Il contient entre autres une version en public de « La Rue des Rosiers ». Le contexte explique qu’il soit souvent oublié dans sa discographie. On y retrouve aussi avant sa sortie en format 45 tours Studio en 1969, une version en public de la chanson Le Métèque.
À 35 ans en 1969, Pia COLOMBO prend des risques et tente pour la première fois l’aventure du récital : seule sur la scène du T.N.P., elle occupera pendant un mois le devant de la scène de la salle Firmin Gémier avec pour programme des chansons de Bertolt Brecht, Kurt Weill, des chansons inédites et le répertoire de ses débuts de carrière.
S’ensuivra enfin, en 1969, le fameux récital Brecht/Weill au TNP qui demeure son plus grand succès personnel et dont il sortira un album en public régulièrement réédité Pia COLOMBO Chante Bertolt Brecht & Kurt Weill (Disques AZ). Pia Colombo interprète les textes de Brecht d’une façon particulière : avec un débit rapide (juste le temps de reprendre de petites respirations), sa position de chant est droite, comme quelqu’un qui tiendrait un calicot, prête à entrer dans la bataille. La passion et la souffrance sont tenues à distance, en respect, au profit de l’efficacité d’interprétation du texte et de la musicalité des titres.
C’est d’ailleurs toujours durant 1969 qu’elle obtient pour ce disque un prix d’interprétation et un prix de l’Académie Charles-Cros.
Elle se fera l’interprète encore en 1969 de la chanson «Le Métèque» et «Il est trop tard» de Georges MOUSTAKI avant qu’il ne les reprenne lui-même à son répertoire et qu’elles ne deviennent célèbres chanté à la première personne par son auteur Moustaki. Incontestablement, ces nouveaux enregistrements avec Michel Colombier et son orchestre, l’un des collaborateurs et arrangeur fétiche de Serge GAINSBOURG, modernisent subtilement le style Pia : un deuxième EP est mis en préparation avec les titres Amour printemps, Mon coeur est dans un nuage, La corde, Cependant. Ces titres seront enregistrés, mais elle ne les verra jamais sortir de son vivant. Ces inédits seront finalement intégrés dans le volume Col. « Héritage » : Pia Colombo – Le Métèque (1967-1969) en tant qu’inédits de l’intégrale Universal Music publiée en 2007 pour les 30 ans de sa disparition.
On notera encore que finalement en 1969, Georges MOUSTAKI enregistrera Le Métèque et il est trop tard avec l’autre arrangeur fétiche de Gainsbourg de cette époque, un certain Alain Goraguer dont l’orchestre a accompagné tous les premiers enregistrements de L’homme à la tête de chou.
Durant les années 1960, elle aura enregistré 10 disques maxi-45 : soit 40 nouveaux titres, et quelques autres inédits que l’on peut retrouver, à priori, sur une compilation publiée en février 2010. Ces EP seront partiellement repris en albums en 1964 et 1965.
En 1970, les disques Festival publient une compilation d’EP L’écluse de sa période 1965.
En 1971, elle reprend le chemin des planches au théâtre dans une pièce de Bertolt Brecht « Maître Puntila et son valet Matti », mise en scène par Jacques Rosner, au Théâtre du Lambrequin, Théâtre national de Strasbourg. Elle enregistre également un nouvel album de 11 titres avec la maison de disques BAM. Le disque de 11 nouveaux titres est intitulé sobrement « Pia Colombo » et son premier titre est Un pays. Sa sortie sera accompagné d’un 45 single : Adagio nocturne.
En 1972, on retrouve Pia COLOMBO sous les traits du personnage la libre-penseuse dans la pièce « Il faut rêver dit Lénine » de Roger Pillaudin. Cette pièce de théâtre musical avec jazz et musique improvisée de Hongrie et d’ailleurs est mise en scène par Jean-Pierre Dougnac. Elle sera présentée pour la première fois le 15 juillet 1972 et jouée pendant 5 représentations au festival d’Avignon (coproduction ORTF et Festival d’Avignon).
Toujours cette même année, Pia monte un nouveau spectacle de chanson qu’elle crée et met en scène : 1930 ou la danse sur un volcan interprété notamment en décembre à la Maison de la culture d’Angers. Les arrangements musicaux ont été réalisés par Karin Trow, l’épouse de Georges Wilson, directeur du TNP.
Pia COLOMBO fait partie à cette époque du groupe d’artistes qui anime La grande kermesse écologique du 11 au 24 octobre 1972, tous les jours de 18 à 24 heures au cinéma Ranelagh – 5, rue des Vignes à Paris XVIe. On retrouve dans ce mouvement Areski Belkacem et Brigitte Fontaine, Georges MOUSTAKI, Rufus, La Horde catalytique pour la Fin…Débats sur les solutions parallèles et alternatives à la pollution à l’issue de projections de film pendant une semaine consacrée à un nouveau mouvement naissant : l’écologie.
Cette même année, le journal Télérama utilise le nom de Pia COLOMBO et d’autres artistes pour vanter dans une campagne publicitaire la qualité de son rédactionnel : son nom figure avec ceux de Olivier Messiaen compositeur et organiste français; Dave Mason, rock star; et Jacques BREL auteur, compositeur, interprète. Ce qui montre bien sa notoriété au sein d’un public avant tout intellectuel.
En septembre 1973, L’humanité et le PCF ont oublié les propos « récupérationistes » sur les chanteurs engagés venus soutenir les manifestants de mai 68. Elle est alors l’une des têtes d’affiche de la fête de « l’Huma » en compagnie de MOULOUDJI, Serge LAMA, Mort SHUMAN et Marc Laferrière.
En 1974, après un changement de maison de disques pour la maison de disques Meys, paraît un nouvel album toujours intitulé sobrement « Pia Colombo » : il contient 12 nouveaux titres dont les singles Les blés et Les communistes. Cet album scelle ses retrouvailles artistiques avec Maurice Fanon (titres « Le Che », « La maison devant la mer »…)
Toujours en 1974, elle fait partie des personnalités qui soutiennent ouvertement la candidature de François Mitterrand à l’élection présidentielle française de 1974. On retrouve son nom juste à côté de ceux de Francesca Solleville, MOULOUDJI, Marc Ogeret, Maurice Fanon, Henri Tachan, Francis Lemarque, Marina Vlady, Jean FERRAT, François Chaumette, Catherine LARA, Catherine Sauvage…
Au cours des années 1970, ses chansons seront ambassadrices d’une certaine culture, et Pia COLOMBO donnera récital en Italie, en France, à Cuba, pays de lutte communiste et aux États-Unis.
En 1975 sort en un album de 5 chansons inédites de Léo FERRE enregistrée par Pia COLOMBO, qui colle bien à ses idéaux. Léo FERRE ne pouvant pas chanter ses propres chansons, il choisit la trempe, la stature, mais aussi la colère et la révolte, ce dont n’a jamais manqué Pia COLOMBO, chanteuse ontologiquement politique et lui donne alors ses nouvelles compositions à interpréter. Répertoire assez inhabituel pour les interprètes, elle est en effet la seule à avoir chanté ces titres. L’album est produit par Léo FERRE, lui-même et sort en même temps que son album « Ferré muet… dirige » qui contient les titres en version instrumentale.
Cette même année, elle donne récital dans Les mardis du Nouveau Carré. Le nouveau carré, 5 rue Papin à Paris a décidé cette année 75 de consacrer des rendez-vous à la chanson française et la poésie en soirée.
En juillet 1977, elle joue le rôle principal dans Mille Hourras pour une gueuse, pièce de théâtre de Mohammed Dib mise en scène par Rafaël Rodriguez et présenté pour la première fois le 18 juillet 1977 et joué jusqu’au 21 au Théâtre Ouvert. Les sortilèges des contes, si proches de la réalité sont mis en espace par un grand romancier algérien.
Toujours en 1977, Pia est brusquement malade et découvre qu’elle est atteinte d’un cancer.
Puis, Pia malade reste longtemps silencieuse jusqu’à la fin 79.
Luttant contre un cancer qui va l’emporter, elle joue, entre 1979 et 1981, un spectacle écrit par son ex-mari, et ami de toujours : « Requiem autour d’un temps présent », oeuvre de Maurice Fanon qui retrace sa carrière de chanteuse et de sa muse. De ce spectacle autobiographique, sortira un double album sur le label WEA intitulé Requiem autour d’un temps présent. Il fut enregistré avec le percussionniste Mino Cinelu qui joua aussi tout au long de la tournée en France, la mise en musique est signée de Gilbert Cascalès, l’un des ses accompagnateurs sur scène au piano. L’équipe de scène est complétée par Patrice Cinelu à la guitare, Denis Barbier aux flûte, scie musicale et saxophone, Philippe Simon aux synthétiseurs et au trombone. Tout ce petit monde se réunira au Studio des Dames, lieu très connu des artistes de cette époque pour une session d’enregistrement avec Henri Loustau à la prise de son.
Le 22 avril 1981, Pia COLOMBO effectue une de ses dernières apparitions à l’Olympia immortalisée par un photographe de l’agence Keystone.
L’une de ses dernières apparitions sera télévisée et très remarquée : pour « Le Grand Échiquier », elle répondra présente à l’invitation de Jacques CHANCEL et le public la découvrira chauve, malade, mais debout et fière.
Sur la fin de sa vie, elle se retire pour affronter la maladie.
Sur https://www.melody.tv/artiste/pia-colombo/
Sur https://www.universalmusic.fr/artistes/20000039867
Naissance
7 Novembre 1926, Wellington, Wellington, New Zealand
Biographie
Chanteur et auteur-compositeur, le Néo-zélandais Graeme Allwright s’illustre avant tout par la reprise en français de standards de la musique folk, dans Joue, Joue, Joue (1965) ou Graeme Allwright Chante Leonard Cohen (1973). Très engagé, il est aussi connu pour ses convictions pacifistes.
Né le 7 novembre 1926 à Wellington, en Nouvelle Zélande, Graeme Allwright est d’abord attiré par la comédie, qu’il exerce d'abord au Royaume-Uni. Il s’installe en France à la fin des années quarante. Tantôt professeur d'anglais, tantôt machiniste, il écume les activités en tout genre, et se produit régulièrement dans des petits cabarets parisiens dès le début des années soixante. Il y rencontre Mouloudji, qui l’encourage à écrire et à enregistrer son premier album, Le Trimardeur, en 1965.
Adaptation française de Dylan et Cohen
Intrigué par le fait que les Français ne comprennent pas toujours les textes de leurs idoles anglo-saxonnes, il enregistre la traduction d’une chanson de Bob Dylan, « Qui a tué Davy Moore ?» dans l’album Joue, Joue, Joue, signé chez Mercury, qu’il ne quitte plus. Le disque paraît en 1966, et jouit d’une certaine reconnaissance grâce au hit « Il faut que je m'en aille ».
C’est avec son troisième album, Le Jour de Clarté (1968), qui reprend également des morceaux de Leonard Cohen ou issus de la vague de la protest song américaine, qu’Allwright connaît enfin le succès. Il se pose alors en principal concurrent d’un autre guitariste féru de Bob Dylan, Hugues Aufray. De plus, ses chansons aux textes anti-militaristes sont très appréciées à cette période de Mai 68.
Exil et pacifisme
Apeuré par ce succès auquel il ne s’attendait pas, Allwright part se ressourcer au Moyen-Orient, en Inde, dans l’Himalaya... Il vit quelques mois à la Réunion, tout en continuant à composer des chansons, qui apparaîtront sous la forme de l’album Questions (1978). Il revient en France plus pacifiste que jamais et s’engage dans de nombreux combats antimilitaristes.
En 1980, les bénéfices d’une tournée avec un autre artiste engagé, Maxime Le Forestier, sont reversés à l'association Partage pour les Enfants du Tiers-Monde.
En 2000, il sort son premier album d’inspiration jazz, enregistré avec The Glenn Ferris Quartet, Tant de Joies, assez bien reçu par la critique.
En 2005, il co-fonde l'association La Marseillaise de Graeme Allwright, où il suggère de nouvelles paroles à l’hymne national, qui débuterait ainsi : « Pour tous les enfants de la terre, Chantons amour et liberté ».
Sur https://www.universalmusic.fr/artistes/20000039867
https://maitron.fr/spip.php?article49879, notice FANON Maurice, Henri par Claude Pennetier, version mise en ligne le 18 avril 2009, dernière modification le 19 août 2022.
Né le 31 décembre 1929 à Auneau (Eure-et-Loir), mort le 30 avril 1991 à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) ; professeur d’anglais puis chanteur auteur-compositeur.
Fils d’une institutrice et d’un commerçant en fournitures scolaires, socialisant, Maurice Fanon fut un enfant « très fugueur » et très « rêveur » qui fit sa scolarité à Chartres. Mais la forte personnalité de son enfance fut son grand-père campagnard, « Octave le rouge », passionné par la Commune de Paris, qui lui apprit les livres, la « Gauche » et la nature.
Maurice Fanon fit ses études universitaires à Rennes, d’abord en philosophie puis en anglais. Il vécut avec une écossaise, Margaret, qu’il décrivit sans ménagement dans Le Testament. Enseignant à Vitry-sur-Seine puis professeur adjoint d’anglais au lycée Buffon de Paris. Maurice Fanon était un amateur de littérature et de jazz. Il écrivit un roman qu’un ami fit lire à Jean-Paul Sartre. Selon Maurice Fanon, celui-ci eut la « gentillesse » de lui dire que c’était mauvais : « quand on prend chaque page séparément, c’est très beau ; mais le tout ensemble, c’est un bric-à-brac, c’est tout ce qu’on veut mais ce n’est pas un roman ».
Évoquant la guerre d’Algérie qu’il fit de 1957 à 1959 terminant avec le grade de caporal, Maurice Fanon déclara à Jean Moalic : « J’ai toujours été profondément antimilitariste mais sans être un militant de l’antimilitarisme. Je n’aurais jamais pu avoir, par exemple, la même démarche que celle d’un objecteur de conscience, encore moins d’un déserteur ». Mais sur place, ses propos hostiles à la « pacification » dérangèrent et il fut muté. Maurice Fanon dénonça la torture dans plusieurs chansons : La Question (1971), Le Képicon (1982). Dans La Valse à soldats (1966) il ne se met pas hors du lot : « Nous étions cent/ Salis salauds/ Combien de sang/ Sur mon calot ». Conscient du problème algérien, il accepta au retour de faire « quelques missions » pour maître Mourad Oussédik. Pia Colombo, souvent plus militante que Maurice Fanon, fit de même.
L’écoute de Léo Ferré, et notamment son interprétation par Catherine Sauvage, avaient orienté Maurice Fanon vers la chanson. Il devint artiste professionnel à la fin des années cinquante et fit la rencontre de la chanteuse Pia Colombo qui fut l’amour de sa vie. Il se mit en ménage avec elle en 1960 après son retour d’Algérie. C’est d’abord pour elle que Maurice Fanon écrivit des chansons. Il lui consacra en particulier un de ses grands succès, L’Écharpe, qui est aussi une des plus belles chansons d’amour du répertoire français. Pendant leur trois ans de vie commune (ils se séparèrent en 1963), leur appartement de la rue Bréat fut un lieu de rencontres pour des artistes de la rive gauche comme Georges Moustaki, Joël Holmès, Boby Lapointe, Oswald d’Andréa et la cinéaste Véra Belmont dont il fut proche. Maurice Fanon avait été embauché au cabaret Le Port du Salut en 1960, mais c’est surtout à La Méthode qu’il finissait ses nuits avec Georges Moustaki et Boby Lapointe. Ayant obtenu le Grand Prix de l’Académie Charles Cros en 1963, la séparation le confirma dans la volonté de chanter lui-même son répertoire. Il se maria le 12 octobre 1964 avec Brigitte Tranchant dont il divorça en juin 1971.
Auteur compositeur de grand talent, Maurice Fanon était essentiellement attaché au texte, la musique venait ensuite, souvent écrite par lui, par d’autres parfois tels Joël Holmès, Oswald d’Andréa ou Gérard Jouannest. Il connut le succès dans les cabarets rive gauche parisiens, sur les scènes militantes et fut chanté par des grandes de la chanson comme Juliette Gréco, Isabelle Aubret, Rosalie Dubois, Mélina Mercouri, Francesca Solleville, car ses interprètes étaient essentiellement féminines.
Le répertoire de Maurice Fanon s’inspirait des douleurs de l’Occupation (La petite juive, 1963), de la guerre d’Algérie (Paris Cayenne, 1963), de la guerre du Vietnam (Les Orgues de Monsieur Johnson, 1968), de l’argent et de la dénonciation du système capitaliste (Les gens qui n’ont pas d’argent) de l’amitié pour Jean-Roger Caussimon (A deux doigt de l’Amour), Jean Ferrat (Vincennes-Neuilly) ou Léo Ferré (Monsieur Léon de Hurlevent) et surtout (près de la moitié de son répertoire) des enthousiasmes et des déceptions amoureuses (L’écharpe 1963 ; Jean-Marie de Pantin, 1965) qui lui donnaient une force émotionnelle singulière. Moins connue, sa chanson Les communistes témoignait en 1974 de sa sympathie pour les militants et de ses réserves pour les orientations et la direction du PCF.
Politiquement, ses amis disent que Maurice Fanon était proche du Parti communiste, mais aussi « anarchiste ». Ils affirmaient aussi qu’il fut un temps franc-maçon sans précision de date et de loge. Maurice Fanon avait vécu intensément Mai 68 « Quel nettoyage de printemps […] Quelque chose meurt/Autre chose naît ». Georges Moustaki, Pia Colombo, Leny Escudero chantèrent dans les universités et les usines, mais on ne trouve pas le nom de Maurice Fanon, ni d’ailleurs celui de Jean Ferrat, sans doute moins tentés par le caractère improvisé de l’exercice.
Son refus des recettes du succès (Avec Fanon, 1963) et un caractère peu malléable le laissèrent à l’écart de la grande carrière que connaissaient Jean Ferrat ou son ami Jacques Brel qui le prit dans ses premières parties en 1967. Catherine Sauvage fit de même à Bobino en 1968, mais son spectacle était mal préparé. Le soutien de Travail et culture et de la Maison pour tous de la rue Mouffetard ne suffit pas à lui gagner un public plus large que celui des cabarets. Sa mauvaise gestion des contrats avec les maisons de disque contribuèrent à casser la carrière de Maurice Fanon. Signataire d’un contrat avec CBS en février 1963, il avait répondu aux sirènes de Barclay en 1966 sans tenir compte des clauses antérieures, entrant dans un long conflit juridique qu’il perdit et qui bloqua ses disques.
La traversé du désert de Maurice Fanon dura une décennie. Désargenté (son appartement fut saisi par les impôts et l’URSSAF fit retenir le revenu de ses droits), aigri, usé par l’alcool, il renonça un temps à chanter. En 1977, Pia Colombo atteinte d’un cancer (dont elle mourut en 1986) lui demanda d’écrire un spectacle, le Requiem Autour d’un temps présent qui fut présenté au Théâtre de la Commune d’Aubervilliers l’année suivante, épreuve difficile, douloureuse qu’il réussit. Les années quatre-vingt lui offrirent de nouvelles chances comme en 1982 et 1984, l’édition de deux disques inédits chez Gérard Meys (ami et producteur de Jean Ferrat) ou la réédition de ses anciens titres chez Barclay. En dépit de ses prestations dans le cabaret le Connétable, tenu par sa nouvelle compagne Françoise Wilcz, de ses concerts à succès au Japon (où ses chansons étaient connues grâce à ses interprètes féminines françaises et nipponnes), ou encore de l’édition du roman Le petit Turc qu’il dit ne pas être autobiographique, il entra dans l‘histoire de la chanson comme un « chanteur maudit ».
Un cancer du poumon emporta Maurice Fanon à l’hôpital américain de Neuilly en avril 1991. Depuis, CBS (Columbia-Sony Music), Barclay et Gérard Meys ont réédité sur CD l’ensemble de son œuvre qui garde un public fidèle.
https://maitron.fr/spip.php?article49879, notice FANON Maurice, Henri par Claude Pennetier, version mise en ligne le 18 avril 2009, dernière modification le 19 août 2022.
Écrit par
Guy ERISMANN : écrivain et musicologue, secrétaire général adjoint de l'Académie Charles-Cros
Sur https://www.universalis.fr/encyclopedie/monique-morelli/
Le nom et la vie de Monique Morelli se rattachent aux poètes du Paris populaire et pittoresque, à Montmartre, ainsi qu'aux plus célèbres cabarets, tant de la rive droite que de la rive gauche.
Avec sa mort, le 27 avril 1993, à Paris, s'est éteinte une génération d'artisans de la chanson française dont les origines remontent aux plus célèbres chanteurs à voix, ceux qui avaient repris l'héritage du XIXe siècle, antérieurement à l'ère de la radiophonie et de la phonographie. On peut évoquer les noms d'Yvonne Georges, de Damia et de Fréhel. Le micro n'était pas leur instrument. À cela tient, en partie du moins, qu'on les classa comme chanteuses réalistes, non seulement à cause des textes et des sujets abordés, mais aussi parce que l'absence de cet intermédiaire factice rendait le contact immédiat, charnel, parfois rugueux.
Monique Morelli (de son vrai nom Monique Dubois) est née à Béthune, le 19 décembre 1923, et rien ne la prédisposait à jouer ce rôle de premier plan et pourtant effacé. Seules son enfance et son adolescence peuvent expliquer ce paradoxe, une entrée dans la vie heurtée, partagée entre le cirque, les cours d'art dramatique, la figuration au cinéma et les petits métiers pour subsister, mais toujours un refus des solutions faciles et des compromissions. Est-ce intérêt véritable ou simple défi de la part de Sacha Guitry qui, dit-on, l'encouragea à chanter ? Elle débuta au cabaret Le Grand Jeu, on l'entendit au Saint-Yves, puis elle participa à l'ouverture de La Rose rouge. Un hommage à Fréhel constitue le programme de son premier disque.
Sa carrière tient en quelques lieux – les cabarets – et quelques poètes. Les cabarets sont devenus mythiques et raniment quelques vieux souvenirs : Le Port du salut, Ma Cousine, Pomme, La Contrescarpe, jusqu'à celui qu'elle ouvrit elle-même, au flanc escarpé de la butte Montmartre, Chez Ubu. Un cheminement naturel la conduisit enfin à Bobino, avec Georges Brassens. Elle maintint Chez Ubu contre vents et marées, de 1962 à 1969. Sur le plateau exigu de la rue du Chevalier-de-La-Barre, elle accueillit les artistes et poètes pauvres, et les débutants. Les poètes chevronnés écoutaient, bavardaient, et Morelli chantait, jouant de sa longue écharpe rouge et de sa voix rauque, parfois langoureuse, souvent gonflée d'énergie. On y voyait les vieux amis, Pierre Seghers, Max-Pol Fouchet, Albert Vidalie et Antoine Blondin ; on y croisait les ombres de Carco et de Mac Orlan, les fantômes de Villon et de Ronsard, ceux de Jehan Rictus et de Gaston Couté.
Pierre Mac Orlan fut la première rencontre poétique de Monique Morelli, et sans doute la plus profonde. Le poète de Saint-Cyr-sur-Morin et du Quai des brumes écrira pour elle, et elle adoptera son répertoire. « Quand elle disparaîtra dans l'écho de sa dernière chanson, a-t-il écrit, ce sera la fin du monde. [...] Ce passé deviendra incompréhensible. » Le poète fut sans doute mauvais prophète, car les souvenirs ne s'éteignent pas si facilement ; mais il est vrai que le passé de Morelli semble mort à jamais dans la forme que nous avons aimée. De ce point de vue, elle nous paraît « incomparable » : sa manière de chanter, de clamer, de porter sa tête en arrière, d'amalgamer les mots et leur musique au fond de sa gorge. D'autres ont bien parlé d'elle, Aragon, surtout, qui fut certainement la rencontre la plus importante après celle du vieux Mac Orlan. Les poètes savent ce qu'ils doivent à celle qui les a si bien chantés, avec une force simple, sans fard et sans effet, soutenue seulement par l'accordéon souvent plaintif de Lino Leonardi. Comment ne pas parler de lui, qui fut la moitié puis le presque-tout de sa vie, l'humble compositeur toujours présent, inventeur de musiques comme le compagnon sertit la pierre taillée par le poète ?
Guy ERISMANN : écrivain et musicologue, secrétaire général adjoint de l'Académie Charles-Cros
Sur https://www.universalis.fr/encyclopedie/monique-morelli/
Article En Ligne 3 ans le 2 septembre 2021Par Philippe Raybaud sur :
https://lesinguliersete.fr/culture-les-grandes-chansons-francophones-point-de-vue-jean-arnulf/
Découvrons aujourd’hui « Point de vue » une chanson de 1963 de Jean Arnulf.
Rangé bien chaudement dans le tiroir des » chansons oubliées « , ce véritable bijou a connu son heure de succès. À l’écoute, votre mémoire peut tressaillir et vous vous surprendrez à vous souvenir d’un titre de votre jeunesse. Souvent contestataire Jean Arnulf, au travers de ce titre, dénonce certains travers de la société, encore existants de nos jours.
Jean Arnulf :
Né en 1932, à Lyon, il se destine au théâtre et rejoint la troupe de Roger Planchon, il vient tout juste de fêter son vingt-cinquième anniversaire. Il débarque à Paris en 1960 et se produit dans les cabarets parisiens de Montmartre et de la rive gauche.
Son premier disque incluant « Point de vue » est récompensé par l’Académie Charles Cros en 1964. Il chante le plus souvent des textes de sa femme Martine Merri, mais aussi des paroles de Henri Gougaud, Jean-Claude Massoulier ou de Roger Planchon.
Son plus grand succès est sa chanson « Point de vue » (1963), classée 3e au hit-parade et sera reprise par Christine Sèvres, Marie-Paule Belle, Claude Vinci et Marc Ogeret. Il interprète aussi des chansons engagées et antimilitaristes comme « Le twist du déserteur ».
Il compose des musiques de film, puis peu à peu disparait des médias. Il s’éteint, dans une maison de retraite parisienne en 2007 dans une indifférence regrettable.
Hélène Martin a été l’un des grand noms de la chanson littéraire et engagée des années 1960 et 1970, infatigable porte-voix des poètes. Et notamment de Jean Genet, dont elle avait mis en musique “Le Condamné à mort” dès le début des années 1960.
Par Valérie Lehoux Publié le 22 février 2021 Mis à jour le 22 février 2021 sur :
https://www.telerama.fr/musique/la-chanteuse-helene-martin-est-morte-et-daho-sait-ce-quil-lui-doit-6824757.php
Nombreux sont ceux qui avaient découvert son nom en 2010, quand Étienne Daho et Jeanne Moreau avaient enregistré – dit et chanté – Le Condamné à mort de Jean Genet… Daho, Moreau, Genet : le trio, bien sûr, avait eu de quoi susciter l’intérêt des médias et du grand public. Hélène Martin en avait profité pour rappeler à quelques journalistes étourdis, ou incultes, que c’est elle qui en avait composé la partition, et pas Daho (qui n’a jamais dit le contraire, mais les médias sont parfois paresseux). Elle avait mis Le Condamné en musique des années plus tôt, avec l’accord de Genet lui-même, et avait été la première à oser porter en scène ce long poème érotico-gay datant de 1942, et toujours subversif. Autant dire, même, qu’il l’était bien plus, lorsqu’elle s’en était emparée, qu’il y a onze ans…
Mais ce n’est pas la crainte de choquer – au contraire ? – qui aurait dissuadé Hélène Martin de faire ce qu’elle voulait, elle qui brisa non seulement les codes de la bienséance en interprétant Jean Genet, mais aussi ceux du genre, puisque, femme, elle se glissait ici dans la peau d’un homme exprimant son désir pour l’un de ses semblables. Quand elle créa Le Condamné à mort en public, Hélène Martin chantait depuis un moment.
Compositrice et interprète
Cohérence d’un chemin en marge des grands circuits, et d’une parfaite rectitude artistique : Genet, déjà, figurait au répertoire de la débutante, cette fille de prof d’histoire-géo férue de poésie, qui arpentait les cabarets rive gauche de l’après-guerre ; là se croisaient alors d’autres figures de cette chanson littéraire qui posa les fondations du genre, Francesca Solleville, Cora Vaucaire, Catherine Sauvage ou Anne Sylvestre. Contrairement à cette dernière, Hélène Martin n’écrivait pas encore ses propres textes (du moins, elle ne les chantait pas). Et contrairement à nombre de jeunes interprètes de l’époque, ou de leur aînée Édith Piaf, elle ne courait pas les paroliers de chansons.
Elle avait un amour tel des poètes (qu’elle fréquentait souvent de près, comme Aragon, Giono, Neruda) qu’elle leur consacra d’emblée le plus clair de sa carrière. Elle eut beau par la suite écrire elle-même, cela n’y changea rien. C’est avant tout la parole des autres qu’elle aimait endosser, à la manière d’une Juliette Gréco… Si ce n’est qu’elle, avec ou sans sa guitare, chantait sans autre théâtralité que celle des inflexions de son timbre, grave, puissant, vibrant. Et qu’elle, donc, composait ses mélodies.
Femme liberté
Ainsi, comme Ferré ou Ferrat, Hélène Martin se sera faite ardente porte-voix des poètes. On peut d’ailleurs s’étonner que la postérité ne lui ait réservé de meilleure place au panthéon de la chanson… Son intransigeance face au « métier » et la création de sa propre maison de production ne lui auront, à coup sûr, pas valu que des soutiens. Ses engagements féministes non plus – notamment lors de la sortie de son album Liberté femme, en 1972, dans une France qui interdisait encore l’avortement.
Enfin, une indéniable humilité à servir celles et ceux qu’elle admirait par-dessus tout, les gens de lettres, ne l’aida pas à se mettre en avant. Même s’il lui arrivait de s’agacer de n’être pas davantage reconnue, Hélène Martin était une authentique passeuse, dans le plus beau sens du terme, et pas seulement en chantant : dans cette décennie 70 de tous les possibles, elle avait imaginé une série d’émissions télévisées sur les poètes et les écrivains, baptisées Plain-Chant. Au Moyen Âge, le plain-chant était une forme musicale utilisée dans un cadre religieux.
Dans la voix d’Hélène Martin, il y avait, en effet, quelque chose de sacré.
Pour Lorca tué à Grenade
Et Desnos privé d'horizon
Feraoun sous la ratonnade
Les assassins ont même nom
Le temps n'est plus qu'à la colère
Si Villon a manqué de pain
Max Jacob est mort en fourrière,
Machado au bout du chemin
Car à Drancy comme en Espagne
Les prisons sont lourdes à porter
Nos morts en rase campagne
N'ont pas tous fini de chanter
Saint-Pol-Roux soupira "Misère !"
Quand la vie lui fut arrachée
Après que les tortionnaires
Jusqu'en son cœur l'aient déchiré
"Finie la vie, adieu ma France !"
Cria Pierre Unik, trébuchant
Meurtri sur cette terre blanche
De Slovaquie, près du printemps
Le peuple était au rendez-vous
Malgré l'automne et l'interdit
Fraternel encore jusqu'au bout
Quand Paul Éluard quitta Paris
Pour Lorca tué à Grenade
Et Desnos privé d'horizon
Feraoun sous la ratonnade
Les assassins ont même nom
Ils sont tombés parmi les hommes
La gorge ouverte aux quatre vents
Mais leur sang brûle encore comme
Brûlent les feux de la Saint-Jean
https://maitron.fr/spip.php?article181077, notice OGERET Marc par Christian Marcadet, Julien Lucchini, version mise en ligne le 24 mai 2016, dernière modification le 23 juillet 2022.
Né le 25 février 1932 à Paris (VIe arr.), mort le 4 juin 2018 à Semur-en-Auxois (Côte-d’Or) ; chanteur, interprète ; militant syndicaliste du Syndicat français des artistes-interprètes (SFA-CGT) ; membre de la société civile pour l’Administration des droits des artistes et musiciens interprètes (Adami), vice-président du collège variétés de l’Adami ; figure majeure de la chanson française à texte dite « chanson Rive-gauche ».
Fils d’une couturière et d’un fonctionnaire du ministère de la Guerre, Marc Ogeret naquit dans le Quartier Latin, rue de l’Abbé-Grégoire. Élève aux lycées Montaigne puis Louis-le-Grand, il connut une scolarité difficile, qu’il interrompit à ses dix-sept ans pour devenir apprenti dans une fonderie. L’expérience fut de courte durée en raison de problèmes de santé et il entra alors chez IBM puis aux usines Renault, où il travailla un temps.
Entraîné par quelques-uns de ses amis, il quitta vite l’usine pour tenter d’embrasser une carrière de comédien. Ses premiers pas sur les planches – en compagnie, notamment, de Guy Bedos et Jean-Pierre Marielle – furent néanmoins eux-aussi éphémères et, en 1950, la troupe se sépara. Marc Ogeret entra alors au centre d’art dramatique de la rue Blanche (Paris, XVIIe arr.), où il resta trois ans.
Pour subvenir à ses besoins, il commença dans le même temps à chanter aux terrasses des cafés parisiens et sur la Côte-d’Azur, interprétant alors essentiellement les répertoires d’Aristide Bruant, de Léo Ferré ou encore de Jacques Douai. Remarqué par un passant qui lui conseilla de rendre visite à Pierre Prévert, il se rendit au cabaret que dirigeait ce dernier, « La Fontaine des Quatre-Saisons », où il fut embauché. Il commença alors à se produire sur la scène des cabarets de la rive gauche, à « La Colombe », « La Contrescarpe » ou « chez Georges ». En 1958, il enregistra ses premiers disques, qui reprenaient son répertoire habituel puis, ayant fait la connaissance de Marc Alyn et Roger Piault, il décida de se consacrer au répertoire poétique.
Au début des années 1960, Roger Piault prit la direction, au sein de la firme Pacific, d’une collection des disques consacrée à ces mêmes répertoires, « Chansons d’Orphée », et Marc Ogeret enregistra, entre 1961 et 1963, six 45 tours reprenant des poèmes de Marc Aly, Pierre Seghers, Louis Aragon ou Luc Bérimont. Ces disques lui valurent, dès 1962, le Grand Prix de l’Académie Charles-Cros. Luc Bérimont organisait alors, à la Maison de la Radio, des jam-sessions poésie, où Marc Ogeret fit la connaissance de Georges Brassens. En 1964, celui-ci demanda à Marc Ogeret d’assurer sa première partie à Bobino.
Trois ans plus tard, en 1967, Marc Ogeret fut à l’affiche d’un co-récital au Théâtre des Trois-Baudets, « Aragon ». Louis Aragon y assista et lia alors connaissance avec le chanteur. En 1968, peu avant les mouvements de mai, Marc Ogeret enregistra deux disques reprenant des chants révolutionnaires, Autour de la Commune. Prévue en avril, la sortie fut repoussée, et les deux albums bénéficièrent d’un bon écho.
Marc Ogeret avait alors rencontré Hélène Martin qui, en 1970, lui confia l’enregistrement de la version intégrale du Condamné à mort de Jean Genet, qu’elle avait mis en musique. Cette même année, il fit une apparition au cinéma, dans un film antimilitariste de René Gilson, L’escadron Volapuk. En 1971, alors que l’on célébrait le centenaire de la Commune de Paris, il donna un récital consacré à cet épisode de l’histoire sociale. L’année suivante, il collabora de nouveau avec Hélène Martin pour un spectacle dédié à Louis Aragon et Elsa Triolet, Le Chemin des oiseaux.
Le début des années 1970 fut, pour Marc Ogeret, le temps d’une longue tournée à l’étranger qui le conduisit en Autriche, en Belgique, et dans l’Europe de l’Est. En 1974, il partit pour cinq semaines en URSS, où il voyagea dans de nombreuses républiques et où ses tours de chants furent un succès. Peu après son retour, il participa avec Francesca Solleville au spectacle Quelle heure peut-il être à Valparaiso ?, écrit par Sergio Ortega à partir de poèmes de Pablo Neruda, et qui se tint au Théâtre des Amandiers de Nanterre deux ans après le coup d’État de Pinochet. Une longue et durable amitié le lia alors avec la chanteuse et, ensemble, ils s’engagèrent alors auprès du Syndicat français des artistes-interprètes (SFA), affilié à la Confédération générale du travail (CGT). Il y joua longtemps un rôle important, préférant l’engagement syndical à l’engagement auprès d’un parti politique. Ainsi, il assuma longtemps le fait de n’avoir jamais eu sa carte d’un parti politique, et revendiqua aussi bien ses amitiés communistes que ses liens avec le mouvement libertaire. En parallèle à son engagement syndical, Marc Ogeret joua également un rôle important au sein de l’Adami, dont il devint ultérieurement le vice-président du collège Variétés jusqu’à sa retraite. Il se produisit également, tout au long de sa carrière, dans de nombreuses manifestations militantes, tous courants du mouvement social confondus, de la Fête de l’Humanité aux rassemblements du Parti socialiste et de Lutte ouvrière, en passant par les Fêtes du Mouvement de la Paix et celles du Premier Mai, à l’initiative de la CGT.
Marc Ogeret poursuivit, dans les années 1980, son engagement artistique, interprétant de nombreuses chansons des répertoires révolutionnaires (notamment pour les périodes de la Révolution française et de la Résistance). En 1983, il fut fait chevalier de l’Ordre national des Arts et de Lettres au siège de l’Adami.
En 1991, à l’occasion du dixième anniversaire de la disparition de Georges Brassens, il fut à l’affiche du festival « Brassens 91 » et, quelques années plus tard, il consacra l’un de ses derniers spectacles à un hommage rendu à Léo Ferré, décédé peu de temps auparavant. Durant sa carrière, Marc Ogeret avait reçu nombre de distinction, parmi lesquelles le Grand Prix de l’Académie Charles-Cros (1962 et 1970), le Prix de l’Académie de la chanson (1963) et le Grand Prix de l’Académie du disque français (1975).
Marc Ogeret avait épousé sa regisseuse, Anita, avec laquelle il eut une fille, Zoé. Après sa retraite, il fit l’acquisition d’une maison et d’un terrain dans l’Yonne, où il vécut ses dernières années.
https://maitron.fr/spip.php?article181077, notice OGERET Marc par Christian Marcadet, Julien Lucchini, version mise en ligne le 24 mai 2016, dernière modification le 23 juillet 2022.
Jean Vasca, né Jean Georges Stievenard le 25 septembre 1940 à Bressuire, dans les Deux-Sèvres, et mort le 21 décembre 2016 à Rivières, dans le Gard, est un auteur-compositeur-interprète français.
Ecrit par Jean-Pierre Nicol. 2005 sur : https://www.epmmusique.fr/fr/cd-chanson-francaise/2470-jean-vasca-chansons-1967-1986-jean-vasca-354139870046.html
Jean Vasca est Vivant ! Vivant comme peu de poètes savent l’être aujourd’hui. Voilà qui confortera la poignée de fidèles qui monte la garde autour de ses mots depuis plus de quarante années maintenant, et rassurera sans doute ceux qui, moins assidus ou emportés par le tourbillon de la vie, prennent néanmoins régulièrement le bulletin de santé de la « bonne chanson française ». Puisqu’il est malheureusement admis que toutes sortes de peuplades squattent désormais le giron de la dame et qu’un tri sélectif s’impose. Vasca a ses clés. Ses qualités d’écriture. Ses millésimes de lumière. Sa poésie est en perpétuel état d’ébriété, écrivais-je en avant-lire de sa biographie en 94. Se situant à la croisée des chemins de Trenet, de Leclerc, de Ferré et de Nougaro (ces deux derniers pour l’entière liberté d’expression et la musicalité brute d’un verbe électrocuté), il a fait ses classes dans les cabarets de la rive gauche, sous la férule de René-Louis Lafforgue, en compagnie de Magny, Sèvres, Lapointe, Fanon, Gougaud ou d’Hélène Martin. Deux rencontres, assez jeune, le marqueront. Celle de Luc Bérimont, poète et homme de radio, comme lui originaire du nord, qui affirme déjà, catégorique que la moindre notation de Vasca, par sa vigueur et sa vitesse, dépasse de cent coudées ce que les patentés de la poésie professionnelle osent en volume. Puis celle d’André Almuro, compositeur contemporain proche de Pierre Schaeffer, l’un des pionniers de la musique concrète, avec lequel il va s’essayer à des créations collectives et aux Poèmes électroniques qui constituent les premiers maillons de son œuvre, en 1963. S’en suit une carrière jalonnée de nombreux et prestigieux prix du disque, de plusieurs passages à l’Olympia et au Théâtre de la Ville, et dont l’ossature est constituée de 21 albums studio où alternent, selon les époques, chansons, poèmes dits et parlé-chanté qui lui vaudront un temps une réputation d’imprécateur, que seul, à part lui, Léo Ferré pu revendiquer. Tout cela orchestré par trois arrangeurs remarquables : « Mimi » Rosso (guitariste de Brassens), Michel Devy, puis Robert Suhas. Seront également publiés 7 recueils regroupant tous ses textes, de 1969 à 2002, qu’une quinzaine d’interprètes dont Lafforgue lui-même, Jacques Douai, Benin, Bertin, Vinci, Montaner, Isabelle Aubret, Francesca Solleville ou Marc Ogeret ont mis à leur répertoire. La poésie de Jean Vasca me conforte dans l’idée qu’aux plus simples choses reste attachée une énigme qu’on n’en finit pas de dénouer, comme on lève le voile des apparences sur l’aura solaire qui transmue et disperse les cendres de chaque aubier de vie. A chacun de dévider cet écheveau infini tressé de signes, de paroles ouvertes, de choisir dans le panier de l’été les fruits offerts de la clémence et du partage, chants de révolte et d’amour, qui sont encore, pour certains, fruits du silence, cris cloués, portes muettes battants sur l’intolérance et le désespoir. Sur l’espoir, aussi. Sa famille de cœur et d’écriture, Vasca l’épicurien qui célébra un temps Villon, Marot, Corneille ou d’Orléans, ne l’a pourtant pas choisie parmi les chantres du soleil. Loin s’en faut. En lui transhument les mange-brume. Rimbaud, Michaux, Bérimont, tous gens d’Ardennes ou du septentrion, comme une poussée lente et ténue à travers l’humus des origines. Un tellurisme, une animalité inquiète, Sabots dans les gadoues/La hure dans les étoiles, dont Vasca est tout pétri, toujours à l’affût d’une comète ou d’un masque de foudre, d’une messagère ailée, flèche de braise jadis épelée par René Char, décochée vers l’invisible, lointaine, extatique, incantatoire. Le cri, le chant ? La poésie. Et d’autres, Kenneth White ou Guillevic, se tenant tête-bêche avec le sud aux immédiates incandescences d’un Delteil, d’un Le Clézio ou d’un Octavio Paz, dans un cataclysme froid ; présences rayonnantes de la galaxie du voyage, avec leurs chants montés de la vague déchirée aux aspérités de la langue. Entre le rire qui s’efforce et l’ivresse qui tue, il y a ça, ce sifflement des vents mauvais et une voix contre, la sienne écrit de lui Marcel Moreau. Voix de sauvage ambiguïté, s’arrachant à l’ordre et saignant au désordre, brûlée de vouloir tout, tout ou rien. Voix d’affamé, d’assoiffé, insatiable diction, rumeur souterraine, de clameur dans l’espace, chant d’un bout à l’autre du chant. Je soutiens que Vasca n’a toujours pas d’égal dans le pourtant vaste panorama de la chanson d’expression, que son écriture est au-delà même des exigences voulues et des libertés permises par ses aînés, ses pairs, tous ses frères de chant. Les vrais poètes-ce pourrait être une gageure, et pourtant…-font vivre la poésie. A l’écart des chapelles et du haut mandarinat. C’est-à-dire qu’ils la nourrissent de leurs fièvres, de leur chair, de leurs émotions vraies. De leur nouveauté aussi et de leur fraîcheur, ce qui n’intercède pas forcément en faveur de leur « modernité ». Rimbaud proclamait : Soyez modernes ! Il n’avait pas dit jusqu’à quel point… La poésie-passion, comme une surenchère de la sensibilité sur l’intelligence, prend aujourd’hui pleine valeur de symbole. En cela, Jean Vasca, passeur d’images solaires, est un de ceux qui l’ont, depuis bientôt un demi-siècle, le mieux incarné. Ecoutez donc cette voix qui parle d’abondance et prolifère avec un vieux réflexe convivial et libertaire. Cette voix qui exagère forcément jusqu’à la démesure pour tous les fous de vivre. Après tout, Rêve ou meurs !
Biographie
Jean Vasca passe son adolescence à Paris. Il étudie au Lycée Louis Buffon. C'est au début des années 1960 qu'il commence à chanter dans des cabarets ses propres textes ou ceux de chanteurs dont il est l'admirateur, tels que Jean Ferrat, Léo Ferré ou Georges Brassens. En 1962 et en 1963, Jean Vasca produit une émission de poésie intitulée Présence du verbe. À la même époque, il présente Poème électronique no 3 à la Biennale de Paris, où il chante et lit ses textes sur une musique électronique d'André Almuro. En 1964, paraît son premier album : intitulé Les Routes, il est arrangé par Jacques Malbet et Barthélémy Rosso (guitariste de Léo Ferré et Georges Brassens). En 1967, Jean Vasca devient rédacteur en chef de la revue Guitare et Musique pour quelques numéros. En 1968, il est récompensé par le Prix de l'Académie de la Chanson pour son troisième album L'Ange exterminateur. Au début des années 1970, il est remarqué par le poète et animateur de radio Luc Bérimont, qui produit et anime en public et sur France Inter l'émission « La Fine Fleur de la Chanson Française ». Il est apprécié par les auditeurs et, suite à ses différents passages dans cette émission, sort un 33 tours chez la Boîte A Musique (Editions Alvarez). C'est aussi grâce à Luc Bérimont qu'il rencontrera des auteurs-compositeurs-interprètes qui deviendront les amis chers de « la bande des cinq » : Jacques Bertin, Jean-Max Brua, Gilles Elbaz, Jean-Luc Juvin. En 1974 sort Un chant, cinquième album qui marque les débuts de sa collaboration avec l'arrangeur Michel Devy. Vasca, très influencé par Léo Ferré, s'oriente là vers le parlé-chanté et un son plus rock. Célébrations, son huitième album paru en 1978, est récompensé par le Grand prix de l'Académie du Disque. L'année suivante, c'est l'album De doute et d'envol qui reçoit le Grand prix de l'Académie Charles Cros. Parallèlement à son activité discographique soutenue, il publie aussi plusieurs recueils de poésies, tels que L'Écarlate et l'Outremer en 1973 et Chansons, Succursales du soleil en 1978. Son dernier disque, intitulé Salut !, date de 2016. Vasca a été interprété par des chanteuses telles que Francesca Solleville, Isabelle Aubret, Christine Sèvres, Micheline Ramette, ou les chanteurs Morice Benin et Marc Ogeret. Ignoré des grands médias mais entouré d'un petit public fidèle, Vasca est un représentant de la chanson poétique libertaire. Engagements Le 18 juin 1976, il est l'un des signataires de l'Appel du 18 joint, manifeste appelant à la légalisation du cannabis en France, publié initialement dans le quotidien Libération. En 1984, il participe au gala de soutien à Radio libertaire.Poète Discographie Albums studio [afficher] 1964 : Les Routes [afficher] 1965 : Chanson 4 étoiles [afficher] 1968 : L'Ange exterminateur [afficher] 1970 : Vivre en flèche [afficher] 1974 : Un chant [afficher] 1975 : Midi [afficher] 1976 : Rêve ou meurs [afficher] 1977 : Célébrations [afficher] 1978 : Un chant... (nouvel enregistrement) [afficher] 1979 : De doute et d'envol [afficher] 1981 : Matinale [afficher] 1984 : Désespérément la vie [afficher] 1986 : Le Grand Sortir [afficher] 1988 : L’Ogre [afficher] 1990 : Ouvert la nuit [afficher] 1993 : De révolte et d’amour [afficher] 1994 : L’Atelier de l’été [afficher] 1996 : En attendant les orages [afficher] 1997 : La Machine imprévisible [afficher] 1999 : Le Fou sacré [afficher] 2001 : Serviteur [afficher] 2003 : Le Meilleur du pire [afficher] 2007 : Un aller simple pour Mars [afficher] 2010 : L'Incertitude, l'Insoumission... et les Étoiles [afficher] 2013 : L'Auberge du temps perdu [afficher] 2015 : Saluts ! Divers 2001 : Un plateau de fruits de mer (CD maxi) Compilations 1986 : Entre autres et pour mémoire 1989 : Jean Vasca, compilation 1975-1980 (53 chansons) 1990 : Marc Ogeret chante Vasca 1992 : Jean Vasca, compilation 1967-1974 & 1981-1987 (54 chansons) 2005 : Poètes & chansons, Jean Vasca chanté par Jean Vasca et Marc Ogeret 2018 : Chansons 1967-1986 Bibliographie Jaillir, PJO, 1969 L'Écarlate et l'Outremer, PJO, 1973 Chansons, suivi de Succursales du Soleil, Ipomée (dessins de Jacques OUDOT), 1978 Je vis j'écris je chante, Ipomée,1981 Le Cri, le Chant, Le Cherche-Midi, 1986 Solos solaires, Le Cherche-Midi, 1992 L'Été d'être, Le Cherche-Midi, 2002 La Concordance des chants, intégrale poèmes et chansons 1964-2014, Éditions Jean Vasca, 2014 Ouvrages sur Jean Vasca Jean-Pierre Nicol, Jean Vasca ou les métamorphoses du soleil. Rétro-Viseur, 1994 Notices Gilles Schlesser, Le cabaret « rive gauche », Archipel, 2006, page 318 [archive]. Bruno Ruiz, Gil Pressnitzer, « Jean Vasca, un chant dans l’épaisseur des mots, un chant de révolte et d’amour » [archive], sur espritsnomades.com, 1er septembre 2011.
Ecrit par Jean-Pierre Nicol. 2005 sur : https://www.epmmusique.fr/fr/cd-chanson-francaise/2470-jean-vasca-chansons-1967-1986-jean-vasca-354139870046.html
On la dit belle et rebelle. Et ça, c’est tout Francesca Solleville, l’insoumise. Elle aurait pu être docile. En quittant le chant classique pour se lancer dans la « variété », elle aurait pu se laisser pieds et poings lier par les requins du show-biz qui, pour leurs poulains, leurs pouliches, décident tout de leur future carrière, choisissent leurs chansons, les formatent en tubes comme du vulgaire dentifrice, de la vaseline, gèrent leur emploi du temps et même leurs amours devant les photographes. Faisant vaciller la chanson d’alors, celle notamment des cabarets, le yéyé pointe son nez en ces années-là : Francesca aurait pu être une de ses égéries ! Le partage est intelligent : la bouillie pour certaines, la poésie pour Francesca. Elle, c’est Louis Aragon, c’est Pierre Mac Orlan, Paul Eluard, Guillevic et pas mal d’autres. Ce seront parmi les plus belles pages de la poésie, de la chanson. Francesca relève tant du livre d’Histoire que du carnet de chants. Elle est indispensable. »
Sur :
https://www.epmmusique.fr/fr/cd-chanson-francaise/2765-francesca-solleville-integrale-1959-1972-francesca-solleville-0602507373560.html
Voici une vraie femme du monde. Pas du grand! Mais de celui qui souffre, qui attend, espère, lutte et se dresse ici comme là-bas... Francois Truffaut écrivit d'elle: "quand une femme chante honnêtement, cela est plus beau que n'importe quoi. Pour moi, la première vertu de Francesca Solleville est sa profonde honnêteté. On a déjà parle de sa sincérité. Je préfère louer sa franchise: elle chante fort, juste, clair, direct (...)". Plus de 50 ans que Francesca Solleville, femme de convictions et de passions, met sa voix vibrante au service des poètes et des auteurs. 50 ans que Francesca porte le feu auprès de son public que le lui rend bien. "belle chanteuse engagée a la blondeur des blés", se souvenait Barbara dans ses mémoires... Femme intemporelle qui porte nos colères et nos rêves aussi. "je ne change pas d'âge, je change d'adresse... j'emporte toute la tendresse", chante-t-elle dans son dernier album "donnez-moi la phrase" paru en 2007. Interprète des plus grands auteurs: Ferré, Ferrat, Aragon, Mac Orlan, Brel, Brassens, Fanon, Louki, Gougaud, Leprest et bien d'autres encore... Fleur populaire exigeante de textes de qualités a porter au public. En fait: Francesca Solleville ne s'est jamais absentée, elle est une "clandestine", se plait-elle a dire aujourd'hui, attentive au monde, loin des strass du show business… Depuis sa révélation au public, au tout début des années 60 auprès de Aragon et Léo Ferré, "chanteuse rive gauche" dans les cabarets, à l'âge d'or de la chanson poétique et engagée (la Contrescarpe, la colombe, l'Écluse...), chanteuse "de terrain" auprès de ses sœurs de lutte (Colette Magny, Pia Colombo, Monique Morelli ou encore Hélène martin...), femme de scène au delà des frontières, porteuse de projets, Francesca poursuit sa route, jusqu'au bout de ses idées, forte de tous ses héritages partages avec son public fidèle et pluriel. Une discographie impressionnante, près d'une trentaine d'albums, plus de 400 titres, du vinyl au numérique, de cabarets en petites salles, de Bobinos en Olympias, de concerts collectifs en festivals, de tournées nationales en tournées internationales, Francesca n'a jamais renoncé à son vrai rôle: porter le chant, servir les poètes, transmettre, émanciper. Tout ce chemin parcouru: c'est sa force. Sa fierté. Sa jeunesse incroyable. Merci madame !
Biographie Origines et études
Francesca Solleville est née à Périgueux (Dordogne) d'un père gascon originaire de Marmande, issu d'une famille de notables conservateurs, et d'une mère italienne qui avait émigré en France avec ses parents pour fuir le fascisme, membre du mouvement antifasciste « Giustizia e libertà ». Elle est la petite-fille de Luigi Campolonghi, membre du parti socialiste italien et animateur de la Ligue italienne des droits de l'homme1. Elle suit des études de lettres à la Sorbonne où elle obtient une licence, et reçoit une formation de chant auprès de la cantatrice Marya Freund. Elle est engagée dans les chœurs de Radio France1. Carrière À partir de 1959, Francesca Solleville délaisse le chant lyrique pour chanter ses auteurs préférés dans les cabarets Rive-Gauche de Paris. Influencée par Germaine Montero et encouragée par Léo Ferré, elle est orientée par Jacques Douai vers la maison de disques Boîte à musique. Elle chante dans de nombreux cabarets, notamment à l'Écluse, où elle se produit avec Barbara, à La Contrescarpe où Elsa Triolet et Louis Aragon viennent l'entendre chanter, à La Colombe où elle croise Pierre Perret et au Port du Salut où chantent également Christine Sèvres, Jacques Debronckart, Maurice Fanon, Pia Colombo, Pierre Louki, Ricet Barrier. En 1959, elle interprète à la Mutualité deux chansons de Louis Aragon (La rose du premier de l'an et Un homme passe sous la fenêtre et chante)1. Elle enregistre son premier 45 tours Francesca Solleville chante Aragon et Mac Orlan. La même année, elle participe à des disques collectifs (chansons enfantines en 45 tours, chansons d'enfants en 33 tours 25 cm). En 1960, elle chante pour son deuxième 45 tours Luc Bérimont, Aragon et Ferré. En 1961 elle chante Mac Orlan dans un nouveau 45 tours. En mai 1962, paraît son premier album 25 cm, intitulé Récital no 1, où elle chante les poètes Paul Fort (La Marine, mis en musique par Georges Brassens), Charles Baudelaire, Louis Aragon et Jean Ferrat (J'entends, j'entends). Dans les années 1960, elle enregistre également des chansons d'Hélène Martin, Georges Coulonges, Yani Spanos, Philippe-Gérard, Serge Rezvani, et des poèmes de Guillaume Apollinaire et Jean Genet. Elle chante dans le film Dragées au poivre qui sort en 19631. En 1964, elle reçoit le Grand Prix de l'Académie Charles-Cros pour son Récital no 2 de 1963. Elle interprète des chansons engagées contre le nazisme, le franquisme, la guerre du Viêt Nam. Elle soutient également la cause ouvrière (Le Chant des ouvriers). En 1971, elle enregistre avec Mouloudji et Armand Mestral La Commune en chantant, un hommage aux cent ans de la Commune de Paris. En 1975, elle sort Chants d'exil et de lutte sur des textes de Pablo Neruda. En 1988, elle célèbre le bicentenaire de la Révolution française avec Musique, citoyennes ! Allain Leprest écrit les paroles de son album Al Dente de 1994. En 2004, elle publie son autobiographie, A piena voce, écrite avec la collaboration de Marc Legras. En 2009, elle fête ses 50 ans de chanson. La même année, un ouvrage lui est consacré, croisant son portrait avec celui d'Allain Leprest2. Francesca Solleville est, avec Isabelle Aubret et Christine Sèvres, la chanteuse ayant le plus interprété Jean Ferrat.
Engagements
En 1990, Francesca Solleville signe l'Appel des 75 contre la guerre du Golfe. Le 30 novembre 2015, elle est parmi les signataires de l'Appel des 58 : « Nous manifesterons pendant l'état d'urgence »3,4. En septembre 2018, elle co-signe une tribune dans The Guardian soutenant l’appel des artistes palestiniens à boycotter l’édition 2019 du concours de l’Eurovision qui doit se tenir en Israël5. Vie privée En 1959, Franscesca Solleville épouse le peintre Louis Loyzeau de Grandmaison1.
Discographie
Albums studio [afficher] 1962 : Récital n°1 (BAM LD 395) [afficher] 1963 : Récital n°2 (BAM LD 402) [afficher] 1965 : Récital n°3 (BAM LD 412) [afficher] 1966 : Récital n°4 (BAM C420) [afficher] 1968 : La Gloire - La fine fleur n°5 (BAM C505) [afficher] 1969 : Récital n°6 (BAM C444) [afficher] 1970 : Mouloudji et Francesca Solleville chantent Aristide Bruant (BAM AZ STEC LP 72) [afficher] 1972 : Francesca Solleville chante la violence et l'espoir (BAM LD5808) [afficher] 1972 : Poèmes vietnamiens chantés par Francesca Solleville (Éditions Combat pour la paix N01001) [afficher] 1974 : Le Visage de l'homme (Le Chant du Monde LDX74550) [afficher] 1975 : Aujourd'hui les femmes (Le Chant du Monde LDX74569) [afficher] 1976 : Francesca Solleville chante Louis Aragon (BAM LD5778) [afficher] 1977 : Francesca Solleville 77 (Le Chant du Monde LDX74652) [afficher] 1980 : L'Émotion (Le Chant du Monde LDX 74723) [afficher] 1983 : Francesca Solleville 83 (Le Chant du monde LDX 74779) [afficher] 1989 : Musique, citoyennes ! (Chantons 89 CH1001) [afficher] 1994 : Francesca Solleville chante Allain Leprest (EPM/Adès 983 122 ADE 660) [afficher] 2000 : Grand frère, petit frère (Le Loup du Faubourg 0205-2 DK038) [afficher] 2003 : On s'ra jamais vieux (Le Loup du faubourg LFB076) [afficher] 2007 : Donnez-moi la phrase... [afficher] 2009 : Je déménage (EPM) [afficher] 2012 : La Promesse à Nonna (EPM 2794083) [afficher] 2017 : Dolce vita (EPM) [afficher] 2019 : Les treize coups de minuit (EPM) Albums en public 1996 : Al dente - enregistrement du spectacle 2001 : En tournée au Japon
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